Quand on va à la rivière, à chaque fois c’est la même histoire. Le dilemme entre « Le Jardin d’Antoine » et « U Mulinu ». Chacun a sa préférence. Le jardin est mieux aménagé, bien plus confortable. Tandis que l’autre est plus rustique, plus « nustrale ». Le premier a un plan d’eau plus calme. Le second offre un bassin permettant de s’adonner aux joies de la baignade et aux plongeons depuis le rocher en surplomb.

Comme on veut rester ensemble, on a décidé qu’on irait une fois chez l’un et une fois chez l’autre. Une bonne façon de contenter tout le monde, même les commerçants ! Parfois, il arrive que certains se promènent entre les deux. C’est tout à fait faisable, ils ne sont qu’à quelques centaines de mètres. Seule la chaleur nous retient de le faire. Quand on est bien installé, chez l’un ou chez l’autre, plus question de lever le camp. Surtout pour changer de nouveau dans l’heure qui suit ! « U Mulinu », comme son nom l’indique, est donc un vieux moulin. Depuis des lustres, il a été transformé en petit bar-restaurant avec une minuscule terrasse. Cette année, on a un peu tardé à y aller. Et quand on est arrivé, il y avait du monde partout. Plus aucune table de libre. Peu de place pour étendre sa serviette. Le moindre rocher était occupé. Même l’autre berge avait été prise d’assaut. Alors, on a fait ni une ni deux. On s’est installé carrément sur les grosses pierres qui servent à créer artificiellement une petite retenue d’eau. Et accessoirement, à traverser pour rejoindre l’autre côté. Oui, c’est bien ça, on s’est assis au milieu de la rivière ! Ben, on n’avait pas d’autre solution. Et il était hors de question de rebrousser chemin. Pour aller où ? Sur une plage encore plus bondée ? Ah, vous voyez, vous aussi vous nous donnez raison. Bon, finalement, on était bien, les pieds dans l’eau… et pas que les pieds d’ailleurs. On s’est bien rafraichi, il n’y a pas à dire ! Les enfants n’arrêtaient pas de crier, de rire, de plonger. On en a profité pour faire comme eux. On les a aidés à attraper des têtards. On s’est amusé à construire des pyramides de pierres. On ne sait pas vraiment si c’était pour laisser une trace, pour marquer notre territoire, ou juste pour passer le temps… Ce qu’on peut vous dire, c’est que ça nous a bien occupés. Choisir sa pierre, faire en sorte qu’elle tienne, en poser une autre par-dessus. Et continuer à les empiler, histoire de voir jusqu’où on peut aller ! Et avant de partir, tout faire tomber pour rendre à la nature son paysage d’origine. Même si on sait que la rivière se serait chargée de tout balayer au premier orage. Mais comme en ce moment, il ne pleut pas souvent, hélas. On a préféré le faire nous-mêmes. Ce n’est pas qu’on se plaigne de ces belles journées. Non. C’est plutôt qu’on redoute le feu. Ce serait vraiment terrible que ça brûle et qu’on ne puisse plus profiter de tous ces petits coins en peine nature. Chaque hiver, on s’inquiète à cause des crues. La force de l’eau emporte des arbres immenses. Et chaque été, on tremble à cause du feu. La ville, c’est bien. On peut y faire beaucoup de choses intéressantes. Mais que serait cette île sans son maquis et sa nature verdoyante ? On voudrait bien que tout reste comme ça. Pourtant, on sait bien que sur cette Terre, rien n’est éternel. Même plus les neiges !