Le choc ! Un film à couper le souffle. On a eu un mal fou à s'extirper de nos fauteuils. C'est donc KO debout, sonnés, que nous sommes sortis. Malgré ce ressenti, nous avons aimé ce film. Comment est-ce encore possible d'être sous le choc, alors qu’il y a 25 ans, Mathieu Kassowits, en lanceur d'alerte, nous balançait à la figure sa "Haine" ? Et comment en toujours au même point voire pire ?
C'est peut-être la raison pour laquelle Ladji Ly a décidé de frapper un grand coup. Une claque magistrale. Pour l'heure, difficile encore de dire si elle nous réveille ou si elle nous laisse sur le carreau.Enfermés dans le décor de cette cité, nous assistons au huis clos qui se joue entre les différents groupes de protagonistes. Happés par les images, les dialogues et les sons assourdissants, nous sommes cloués au fond de nos sièges.Hypnotisés par le rythme qui s'accélère, nous sommes les témoins sans réaction de ce déferlement de violence. On manque d'air, on suffoque, on est au bord du malaise.

Par moment, on est même un peu largués par les dialogues de ces gavroches des temps modernes. Le réalisateur, qui a grandi dans cette cité et en maîtrise parfaitement les codes, nous fait ici une proposition. Même si tout n'est pas forcément vraisemblable, il dépeint un tableau en clair obscur qui met en lumière le climat de tensions, l'engrenage de la violence, la nécessité de trouver des solutions pour vivre ensemble.

Les barres d’immeubles semblent former des citadelles. Mais loin de protéger leurs habitants, elles les enferment et les coupent du monde extérieur. Et les tours, si hautes soient-elles, ne protègent pas davantage ceux qui, à l'extérieur, persistent à faire comme si cela n’existait pas. Pourtant, vue du ciel, grâce au drone, la cité, pour étendue qu’elle soit, n'en est pour autant pas infinie. Comment ces lieux de vie sont-ils devenus des lieux de non droit où règne la loi du plus fort ? Courage, volonté politiques et implications de tous sont nécessaires pour faire tomber les murs et construire les passerelles indispensables au vivre ensemble et non plus les uns contre les autres.

Au mot fin, chacun est libre de se faire son opinion et tirer les conclusions qui s'imposent. L'urgence : agir avant que l'état d'urgence ne soit déclaré car le feu couve et la menace d'un embrasement généralisé est réelle.

Piqûre de rappel sur la violence, ce film n’est pas pour autant un vaccin. L'erreur fatale serait de la banaliser, de s'y habituer. Il est vital de la refuser. Sous toutes ses formes, physique, verbale ou psychique. Car c'est notre indifférence qui fait le lit de cette violence. Les seuls remparts pour la contenir avant de l'éradiquer, sont les mots. Ceux d'Hugo, de la littérature en général, de tout un chacun. Des mots simples, venants du cœur, pour accueillir les malheurs de la misère et apaiser la souffrance. La bonne nouvelle, c'est que tout le monde sait faire ça !